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Photo du rédacteurNicolas Nouchi

Du coffee shop au diner, il n’y a qu’un pas

Pour le lecteur qui était parti en retraite détox en Inde pendant 24 mois, ou pour celui qui n’a pas encore prêté attention au phénomène (peut-être qu’il y en a un ou deux qui sont passés à côté), la boisson chaude est toujours en très forte progression sur le marché français.


Pas besoin d’entrer dans le détail de cette évolution, mise en avant par tous les acteurs de la chaîne de valeur et expliquée par un intérêt grandissant du consommateur pour la boisson chaude (expertise, préférences, notoriété des recettes gourmandes), ainsi que par des lieux de consommation qui se multiplient avec une attention particulière pour la qualité et la mise en scène.


Avec, bien sûr, le coffee shop en tête de cortège, suivi de près par de nombreux cafés, hôtels, et restaurants qui ont changé de point de vue en y apportant un réel intérêt, et par le phénomène de la « coffeeshopisation » de la boulangerie-pâtisserie, où la boisson occupe désormais une part de plus en plus significative du chiffre d’affaires.


Mais il y a encore de la marge !


Si vous envisagez de tout plaquer pour créer votre coffee shop, il reste de l’espace. Si vous en avez déjà un, félicitations ! Si vous n’êtes pas un coffee shop mais que vous envisagez de remplacer votre solution café, réfléchissez bien avant d’opter pour une solution premier prix, car :


  • Il reste de l’espace car les nouvelles générations sont conditionnées par cette boisson On-The-Go et ne prévoient pas de s’en lasser…

  • Il reste encore 90% des petits déjeuners qui ne sont pas encore consommés hors domicile (Etude Speak Snacking 2024 disponible sur simple demande)

  • On a tous besoin d’une pause supplémentaire, idéalement accompagnée d’un liquide (près de 70% des 1,7 pauses prises en moyenne par un actif sont accompagnées d’un liquide ou d’un solide)

  • Le coffee shop devient le nouveau « spot » pour se socialiser (les jeunes ne se donnant plus automatiquement rendez-vous dans un bar), ou pour disposer du calme nécessaire pour travailler quelques minutes

  • Le coffee shop véhicule (à tort ou à raison) un sentiment de bien-être très saillant par le biais de ses marqueurs de qualité dans la boisson chaude, ses vertus désaltérantes, naturelles et bientôt détoxifiantes… Pour équilibrer le fast food consommé sans réfléchir de la veille, booster/recharger les batteries du consommateur ou procurer un court instant de blend, de calme et volupté.


A cela s’ajoute le choix d’ouvrir un Coffee shop :


Solution convenable et idéale pour un autodidacte : les autodidactes trouvent dans la formation de barista un cursus diplômant qui leur confère aisément le titre d' « expertis honoris barista causa ».


Et les voilà presque restaurateurs, à même de déployer sur place toutes les idées ingénieuses élaborées durant les travaux ou pendant la période de préavis de leurs précédents jobs.


De plus, pas besoin de chercher un local avec extraction. C’est dans ce contexte également que de nombreux lieux qui n’ont rien à voir avec le café posent une belle machine, un joli moulin et 3 cookies qui tiennent la conversation à une part de cake. Parfois à l’entrée d’un musée ou près de la caisse dans une boutique de fringues un peu « branchouille ».


Et voilà le marché qui se positionne et affiche des croissances à deux chiffres, réussissant à se maintenir même en période de crise, en surfant sur le succès de la boisson chaude, qui n’en finit pas de se diversifier avec la qualité du grain et des recettes en toile de fond actuellement… Mais la boisson chaude n’est pas le seul élément qui séduit dans un coffee shop.


Il ne s’agit donc pas d’évoquer la puissance de transparence que la boisson chaude peut procurer pour rassurer son consommateur, ni d’insister sur l’opportunité de mettre en avant les recettes de boissons gourmandes et signatures avec la même délicatesse et minutie qu’un bar à cocktails, rappelant le parallèle fort entre l’art du café et la mixologie. Ni non plus du potentiel encore disponible des réseaux déjà en place et de ceux qui débutent tout juste.


Il fallait simplement poser le postulat que le coffee shop n’a pas encore atteint son apogée en France pour imaginer la V2 du coffee shop et se poser la question de l’évolution du marché. Les marchés européens, et en particulier les zones touristiques, offrent désormais de nouvelles structures de coffee shops, mettant en avant la boisson chaude mais avec une offre alimentaire plus complète, tendant vers le brunch ou l’assiette sur le modèle du coffee bakery à l’américaine.


Un mode brunch disponible toute la semaine et potentiellement à toute heure de la journée, avec en vedettes les œufs Benedict ou l’avocado toast (tant que l’on continuera à vendre de l’avocat…), en second rôle les burgers, bagels, muffins ou English toast, et parfois une ou deux recettes signature, avec des notes légèrement ethniques pour éveiller les papilles.



En dehors de quelques points de vente très singuliers qui ne proposent que de la boisson chaude et trois parts de cake, l’activité du coffee shop se construit sur les instants, sur la réponse cohérente aux attentes des consommateurs et donc sur la boisson fraîche ainsi que des mets sucrés et salés…


Une offre bien travaillée, portée par quelques produits signatures, puis quelques promotions/menus qui créent l’habitude et donnent envie…


Le consommateur cherche parfois, en semaine, des solutions brunch, même si pour le consommateur français, le brunch, c’est d’abord et avant tout le week-end. Mais c’est l’opportunité de rattraper le petit déjeuner manqué et de faire un 2-en-1, plus tôt ou plus tard que les heures traditionnelles du déjeuner.


  • L’hybridation du marché : Les activités et les métiers fusionnent, et de nombreux établissements cherchent le meilleur combo possible pour répondre aux attentes des consommateurs.Les boulangeries se positionnent sur la boisson chaude et vont devenir de plus en plus une référence, occupant progressivement l’espace laissé par la conversion progressive des débits de boisson en cafés-restaurants. Le jeune consommateur perd le repère du débit de boisson au profit d’autres lieux. La place grandissante de la boulangerie va imposer une adaptation au monde du coffee shop. Les cafés, également, vont se rapprocher de cette proposition pour offrir une offre salée plus complète, plus facile à assembler et toujours aussi gourmande, ce qui devrait simplifier les opérations dans de nombreux points de vente, confrontés à la difficulté de recruter et de former.


  • Les touristes, qui sont plus enclins à fréquenter des lieux rassurants dans lesquels ils se sentent très à l’aise. On y retrouve toujours quelques blockbusters (ces recettes incontournables comme la salade Caesar), des propositions disponibles à l’assiette ou à emporter avec leur latte macchiato. Dans ces lieux, la naturalité se prolonge au-delà du café avec des options qui accueillent encore mieux les « sans » : menu avec version sans gluten, plat vegan avec beaucoup de graines et de jolies couleurs dans l’assiette…


  • Et enfin, la bascule dans ce nouvel univers va permettre à des lieux avec licence d’alcool de faire coexister les boissons. Il sera donc tout à fait cohérent de prendre des chicken wings avec un Moscow Mule ou un avocado toast avec un Pisco Sour.Rien de neuf dans le fait que ces lieux existent déjà ou s’en rapprochent. La chaîne Le Pain Quotidien est sur ce créneau depuis des décennies, ainsi que Benedict à Paris 4e, et des concepts récents comme Hollybelly, Clint, ou encore Blondie, qui se développe rapidement dans cet esprit.


Mais cette tendance pourrait potentiellement se généraliser dans de nombreux points de vente, car ils sont à la croisée d’une demande en progression et d’une offre plus simple à déployer pour un restaurant du quotidien : des menus compréhensibles, faciles à exécuter pour un personnel avec une formation très courte. De la pluri-canalité avec des lieux accueillants pour un travailleur en vadrouille, deux couples d’amis croisés par inadvertance ou des touristes de passage à Paris…Un « diner » à la française qui vient petit à petit bousculer les habitudes trop sucrées du consommateur français et offrir des alternatives gourmandes et bigarrées.


La différence reposera alors sur l’originalité, l’atmosphère, la résonance sociale et l’excellence…


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